Interview
Le défi du Lac Titicaca
Malia Metella
Nageuse olympique
4 décembre 2023
Au lendemain du premier confinement, un appel résonne dans la vie de Malia Metella. À l'autre bout du fil, Théo Curin, nageur paralympique émérite (ndlr: il a été amputé de ses quatre membres après avoir contracté une méningite) qui est à la recherche d’équipiers pour relever un défi de taille : la traversée du lac Titicaca, à la nage.
Malia accepte cette folle aventure même si cela fait onze ans que sa carrière sportive est en pause.
Ils seront trois à s’élancer : Malia Metella, Matthieu Witvoet et Théo Curin.
Mais pour cette fois, il n’est pas question de s’affronter chacun dans une ligne d’un bassin olympique, ils vont devoir se dépasser en travaillant en équipe.
Quinze mois de préparation intense sont nécessaires pour relever ce défi. Ils vont devoir renforcer leurs muscles et familiariser leurs organismes aux eaux glaciales du Titicaca. Sur place, ils devront tracter à la nage un radeau de plus de cinq cents kilos, à une altitude de 3800 mètres et donc avec un taux d’oxygène bien plus bas que d’ordinaire.
Le périple débute en novembre 2021, avec l’objectif de parcourir les 122 kilomètres qui séparent une rive de l’autre.
Sur leur radeau de survie de cinq mètres, chaque membre de l'équipe a un rôle vital à jouer. Malia, par exemple, est chargée du filtrage de l'eau et de la navigation, et elle doit guider l'équipe à travers les eaux de ce lac sacré.
Dès les premiers jours, l’expédition est marquée par des défis météorologiques inattendus : des orages violents et des tempêtes glaciales. La résilience de l'équipe est mise à rude épreuve. Chaque jour, bravant les eaux à moins de 10 degrés du Lac Titicaca, ils nagent pendant huit heures, se relaient toutes les heures et se réchauffent avec une boisson chaude toutes les 20 minutes. Les ancrages flottants sont lâchés pour éviter la dérive du radeau lors des tempêtes.
Au quatrième jour, la traversée de la frontière maritime entre la Bolivie et le Pérou les oblige à rester loin des côtes, laissant leur bateau voguer à la dérive au milieu de la nuit.
Au huitième jour, un tournant difficile survient : Théo Curin est à bout de force, il demande alors à abandonner l’aventure. Les discussions en équipe et la rédaction d'une lettre personnelle servent de bouées de sauvetage émotionnelles, le ramenant vers ses objectifs initiaux : transcender ce défi et ceci, malgré son handicap.
Les pêcheurs locaux leur offrent hospitalité et conseils, et de chaleureux repas à l’abri des orages afin de protéger l’équipe. Chaque journée est une lutte contre les éléments, mais aussi un dépassement de soi. La fatigue physique et mentale s'accumule, mais l'équipe trouve des solutions. Ensemble, ils s’adaptent aux imprévus.
Au 11eme jour, le périple touche à sa fin et le rivage approche alors que les cris des spectateurs locaux présents rappellent à Malia des souvenirs de gloire olympique.
Les trois aventuriers pleurent ensemble, l’épuisement laissant place à la fierté et au triomphe. C’est finalement bien plus qu'une simple victoire sportive que viennent de vivre nos trois champions. Ensemble ils ont fait preuve de résilience et d'abnégation.
Quinze mois de préparation, onze jours de traversée forte en émotions, trois tempêtes. Malia Metella, Matthieu Witvoet et Théo Curin ont non seulement atteint leur objectif, mais ils ont également dépassé leurs limites, découvrant la véritable force du collectif. Leur aventure, marquée par des moments difficiles et un triomphe partagé, atteste que, dans le monde du sport comme dans la vie, la vraie grandeur réside souvent dans la solidarité.